Bioreg encourage la valorisation des déchets de bois

Une plateforme européenne pour partager les bonnes pratiques

Comment valoriser les déchets de bois inexploités en Europe ? Quelles sont les meilleures pratiques de collecte et de traitement ? Quels sont les risques de conflits d’usage ? Le projet Bioreg tente de répondre. Un an après sa création, une plateforme européenne d’échanges des meilleures pratiques vient de voir le jour. Une façon de garantir à l’échelle d’un continent, des débouchés pérennes pour des flux de déchets, qui dans certains pays, n’ont d’autre exutoire que la décharge.

Le projet Bioreg a démarré en janvier 2017, pour une durée de trois ans. Financé à hauteur d’un million d’euros par la Commission européenne, il réunit un consortium d’acteurs de huit régions d’Europe : Göteborg (Suède), Bade-Wurtemberg (Allemagne), Styrie (Autriche), Lombardie (Italie), nord-ouest de la Grande-Bretagne, Normandie (France), Lublin (Pologne), Alentejo et Lisbonne (Portugal). Les partenaires du projet comptent le CEDEN (Cabinet d’études sur les déchets et l’énergie), Biomasse Normandie, Bios, Business Région Göteborg, Eubia, Europroject, IUNG et Universidad Novae de Lisboa.

Plateformes de broyats saturées

Bioreg a été lancé sur fond de tensions très vives en Europe, relatives au manque cruel de débouchés pour les déchets de bois. « D’un côté, l’industrie du panneau subissait la récession économique, de l’autre, le combustible bois subissait un hiver plutôt clément et l’insuffisance d’unités de co-génération » rappelle Dominique Boulday, responsable du pôle déchets environnement énergie au sein du CEDEN et coordinateur du projet Bioreg. Avec comme conséquences, des plateformes de préparation de broyats et de palettes usagées saturées, et un risque pour la sécurité des sites en termes d’incendie. En France, les déchets bois du BTP et les nouveaux gisements issus des déchets d’ameublement ont envahi certains sites d’opérateurs, incapables d’écouler ces matériaux.

Une déchèterie à Paris

En un an, les choses ont changé, à commencer par un regain économique. En Europe, l’industrie du panneau a refait surface et les entreprises du secteur en France se sont engagées à intégrer 500 000 tonnes de déchets de bois supplémentaires dans leurs panneaux à moyen terme. Autre évolution, celle du bois-énergie. Certains pays comme la Grande-Bretagne, exportateur de déchets de bois autrefois, viennent aujourd’hui frapper à la porte de la France et de l’Allemagne pour acheter du déchet de bois. Un plan d’augmentation des capacités de cogénération au Royaume-Uni explique sans doute ce renversement de tendance. La Suède importe aussi des déchets de bois à partir des ports normands. Tous ces projets sont relativement récents et pourraient peut-être faire basculer le marché dans un contexte de tensions sur la ressource. D’où l’intérêt d’anticiper par l’échange de connaissances. Dans l’hexagone, la réglementation sur les énergies renouvelables et la fiscalité environnementales, ainsi que l’émergence de plusieurs projets biomasse et CSR inscrivent enfin la valorisation des déchets bois sous un jour plus favorable. Ce qui n’empêche pas de rester vigilant, car le secteur est encore fragile et les projets prennent du temps à se construire.

Une attention à l’égard des pays enfouisseurs

 

A l’opposé,  des gisements de bois résiduels finissent toujours en enfouissement en Europe de l’Est et du Sud. Ces écarts de traitement méritent aujourd’hui une attention particulière, d’où la création d’une plateforme, ouverte à tout un chacun (producteur, collecteur, transformateur, collectivité territoriale) pour y déposer ses contributions, ses retours d’expériences. La plateforme Bioreg est en cours de développement et sera complètement opérationnelle en 2019. Elle permettra à ses membres d’avoir accès à des informations sur les pratiques en Europe ; de présenter leurs compétences en utilisant notamment l’outil de cartographie ; d’inciter les décideurs à adapter le cadre réglementaire ; d’avoir accès aux investisseurs ; ou encore de favoriser la coopération entre les autorités régionales et le développement de projets industriels.

Encombrants déposés dans la rue en vue de leur ramassage

Quelques contributions ont déjà été déposées par des organisations françaises. Il s’agit d’informations sur les campagnes de caractérisation des déchets de bois issus de l’ameublement et de la déconstruction, soutenues respectivement par les deux éco-organismes français, éco-mobilier et Valdelia de la filière REP DEA, et le syndicat des entreprises de déconstruction, dépollution et recyclage (Seddre). Dans le premier cas, quelque 300 analyses physicochimiques et 4 tests de combustion à l’échelon industriel sont prévus d’ici mars prochain. L’objectif est de comparer ce flux avec de la biomasse vierge, ainsi que la qualité des émissions de gaz et des cendres. Le programme ECIRBEN mené depuis 2016 en France par Biomasse Normandie, CEDEN, FCBA et CRITT Logistic, est également mentionné sur la plateforme. L’objectif est de relocaliser les entreprises et les gisements de déchets de bois en Normandie pour les valoriser et les recycler sur place. A ce jour, plusieurs projets d’une capacité totale de 500 000 tonnes de déchets de bois sont à l’étude.

Une plateforme autonome en 2021

 

Au-delà de la diffusion des connaissances et des pratiques positives sur la valorisation des déchets de bois, la plateforme peut également accueillir des informations concernant de l’événementiel (séminaires, conférences, visites de sites). Une opération de communication et de promotion de la plateforme sera menée tout le mois de novembre dans le cadre des salons internationaux Ecomondo à Rimini en Italie et Pollutec à Lyon. Le projet Bioreg doit s’achever en 2019. La plateforme européenne prendra le relais, mais restera encadrée et suivie par les coordinateurs de Bioreg pendant deux ans. Reste à savoir, si elle pourra ensuite fonctionner en toute autonomie. « Nous espérons surtout que cet outil soit utilisé efficacement et régulièrement pour faciliter l’identification et la dissémination des meilleures pratiques » souligne Dominique Boulday. Il serait dommage de financer un outil européen non utilisé par les acteurs de la filière, parce qu’à un moment donné, l’économie du secteur se porte bien. Une alimentation régulière garantira sa pertinence. C’est pourquoi viendront plus tard s’ajouter d’autres services comme la création de groupes d’intérêt. L’idée est de créer des interactions et attirer le plus d’acteurs possibles. Les problèmes liés au conflit d’usages entre recyclage et valorisation énergétique, ou encore la réutilisation de certains matériaux de bois imprégnés issus de la déconstruction font partie des sujets d’actualité susceptibles d’intéresser le plus grand nombre.

Crédit : CM

Lire aussi :

L’étude Valopal

Une filière de CSR toujours timide en France

Partagez cet article